Canton d’Emo

Canton d’Emo

février 16, 2023

16 février 2023

L’Ombudsman a examiné une plainte à propos d’une séance de formation tenue par le conseil du Canton d’Emo le 28 mai 2022. La plainte alléguait que le conseil avait enfreint la Loi de 2001 sur les municipalités et son règlement de procédure en tenant à huis clos une séance de formation sur le budget, sans en aviser le public.

L’Ombudsman a conclu que le conseil du Canton d’Emo n’avait pas enfreint la Loi de 2001 sur les municipalités, ni son règlement de procédure, en tenant une séance de formation à huis clos le 28 mai 2022. Cette séance relevait de l’exception de « l’éducation ou la formation », car le conseil avait reçu alors une formation sur le nouveau format du budget, et la séance n’avait pas fait avancer de façon importante les travaux ou la prise de décision du conseil. De plus, le Canton n'était pas tenu d’afficher un avis de cette séance de formation, car elle ne constituait pas une réunion en vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités, et n’était donc pas assujettie aux règles des réunions publiques.

Enquête sur une rencontre du conseil du Canton d’Emo le 28 mai 2022

Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario

Janvier 2023


 

Plainte

1    Mon Bureau a reçu une plainte à propos d’une séance de formation tenue par le conseil du Canton d’Emo (le « Canton ») le 28 mai 2022. La plainte alléguait que la discussion à huis clos du conseil ne relevait d’aucune des exceptions prescrites dans la Loi de 2001 sur les municipalités (la « Loi »)[1] et que le Canton n’avait pas communiqué d’avis approprié de cette séance de formation au public.

2    Mon enquête a permis de déterminer que le conseil du Canton d'Emo n'avait pas enfreint la Loi de 2001 sur les municipalités ni son propre règlement de procédure en tenant une séance de formation à huis clos le 28 mai 2022. Mon examen a également conclu que le Canton n'était pas tenu d'afficher un avis de cette séance de formation, car elle ne constituait pas une réunion aux fins de la Loi et du règlement de procédure du Canton, et n'était donc pas assujettie aux règles des réunions publiques.

 

Compétence de l’Ombudsman

3    En vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités (la « Loi »), toutes les réunions d’un conseil municipal, d’un conseil local et des comités de l’un ou de l’autre doivent se tenir en public, sauf si elles font l'objet d'exceptions prescrites.

4    Depuis le 1er janvier 2008, la Loi sur les municipalités accorde à quiconque le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité ou un conseil local a respecté la Loi en se réunissant à huis clos. Les municipalités peuvent nommer leur propre enquêteur(euse). La Loi fait de l'Ombudsman l'enquêteur par défaut dans les municipalités qui n'ont pas désigné le(la) leur.

5    L’Ombudsman est l'enquêteur chargé des réunions à huis clos pour le Canton d'Emo.

6    Lorsque nous enquêtons sur des plaintes sur des réunions à huis clos, nous examinons si les exigences relatives aux réunions publiques énoncées dans la Loi et le règlement de procédure applicable ont été respectées.

7    Depuis 2008, mon Bureau a enquêté sur des centaines de réunions à huis clos. Pour aider les conseils municipaux, le personnel municipal et le public, nous avons créé un recueil en ligne des cas de réunions publiques. Nous avons créé ce recueil interrogeable pour permettre aux intéressé(e)s d'accéder facilement aux décisions de l'Ombudsman et à ses interprétations des règles des réunions publiques. Les membres du conseil et le personnel peuvent consulter ce recueil pour éclairer leurs discussions et leurs décisions afin de déterminer si certaines questions devraient ou pourraient être discutées à huis clos, ainsi que pour examiner les questions liées aux procédures des réunions publiques. Des résumés des décisions antérieures de l’Ombudsman sont consultables dans ce recueil : https://www.ombudsman.on.ca/digest-fr/accueil.

 

Processus d’enquête

8    Le 21 juin 2022, mon Bureau a informé le Canton de son intention d’enquêter sur cette plainte.

9    Mon Bureau a examiné le règlement de procédure du Canton et les parties pertinentes de la Loi. De plus, nous avons examiné l’ordre du jour de la séance de formation, la documentation et la correspondance connexes à cette séance, ainsi que le procès-verbal de la séance publique. Aucun procès-verbal n’a été dressé durant la discussion à huis clos.

10    Mon Bureau a interviewé les cinq membres du conseil, ainsi que la DG intérimaire/greffière-trésorière, le coordonnateur des projets spéciaux et le surintendant des travaux publics.

11    Nous avons obtenu une pleine coopération dans cette affaire.

 

Règlement de procédure

12    Le règlement de procédure 2019-04 du Canton précise la manière dont les avis des réunions ordinaires et extraordinaires du conseil doivent être communiqués. Plus précisément, l’avis des réunions ordinaires du conseil doit être publié dans les ordres du jour des réunions, et l’avis des réunions ordinaires et extraordinaires doit être affiché au bureau de poste d’Emo et au bureau municipal[2]. De plus, l’article 5.3 du règlement de procédure exige que le Canton donne un préavis de 48 heures pour les réunions extraordinaires, à moins que la majorité du conseil n’en décide autrement.

 

Contexte

13    Le personnel du Canton a élaboré un nouveau format pour le budget 2022-2023, qui comprend beaucoup plus de détails que le format précédent. En préparation au processus d’approbation du budget, le personnel du Canton a prévu une séance de formation le 28 mai 2022 pour expliquer le nouveau format du budget au conseil. Les membres du conseil et du personnel ont été en désaccord quant à savoir si la séance de formation du 28 mai 2022 constituait une réunion exigeant un avis au public. En fin de compte, le Canton n’a pas communiqué d’avis de la séance de formation au public.

 

Séance de formation du 28 mai 2022

14    Le 28 mai 2022, trois des cinq membres du conseil se sont réuni(e)s à 10 h 00 au bureau municipal. Le conseil a immédiatement adopté une résolution pour approuver l’ordre du jour et une autre pour se retirer à huis clos « […] pour achever la formation du conseil en vue de comprendre les documents du budget de 2022 tels que décrits dans les feuilles de tableur Excel 61 ». La résolution ne citait pas d’exception prévue par la Loi, mais mon Bureau a été informé que le conseil avait invoqué l’exception de « l’éducation ou la formation » au paragraphe 239 (3.1) de la Loi.

15    Mon Bureau a été informé que, lors de la séance, le coordonnateur des projets spéciaux du Canton avait avisé le conseil que la formation ne ferait avancer aucun des travaux du conseil. Mon Bureau a aussi été informé que le coordonnateur des projets spéciaux avait fait ensuite une présentation sur le nouveau format du budget, qui était beaucoup plus détaillé que celui des années précédentes.

16    Les personnes que nous avons interviewées ont déclaré que le but de la séance était de permettre aux membres du conseil de mieux savoir comment lire et comprendre le nouveau document budgétaire. L’une des personnes interviewées a comparé cette présentation à un cours de style universitaire.

17    D’après nos entrevues, les membres du conseil n’ont pas interagi entre eux(elles) durant la séance, et ont seulement posé des questions au personnel. Mon Bureau n’a trouvé aucune preuve pouvant indiquer que le conseil avait discuté ou débattu de quelque sujet que ce soit, et il a déterminé que le conseil n’avait pris aucune décision, donné aucune directive au personnel durant la séance.

18    Le conseil a adopté une résolution pour revenir de la séance à huis clos à 13 h 30 puis a levé la réunion à 13 h 32.

 

Analyse

Applicabilité de l’exception de « l’éducation ou la formation » prévue par la Loi

19    En vertu de la Loi, toutes les réunions d’un conseil municipal, d’un conseil local et des comités de l’un ou de l’autre doivent se tenir en public, à moins qu’elles ne relèvent d’une exception prescrite à l’article 239 de la Loi.

20    Le conseil a invoqué l’exception de « l’éducation ou la formation » au paragraphe 239 (3.1) pour tenir une réunion à huis clos le 28 mai 2022.

21    En vertu du paragraphe 239 (3.1) de la Loi, une réunion peut se dérouler à huis clos si, d’une part, elle a pour but d’éduquer ou de former les membres du conseil et si, d’autre part, les membres ne discutent d’aucune question pouvant faire avancer de façon importante les travaux ou la prise de décision du conseil.

22    En ce qui concerne la première exigence, mon Bureau a précédemment conclu que l’exception de « l’éducation ou la formation » couvre les réunions qui se déroulent à huis clos pour permettre aux membres du conseil d’acquérir des compétences ou des renseignements pouvant les aider à mieux comprendre les travaux de la municipalité[3].

23    Par exemple, mon Bureau a déterminé que l’exception de l’éducation ou la formation s’appliquait à une réunion tenue par le Canton de Russell, durant laquelle les conseiller(ère)s s’étaient assis(e)s comme dans une salle de classe et avaient reçu une formation sur le vocabulaire et les principes du processus de planification stratégique, en référence au plan stratégique de Russell[4].

24    Dans le cas présent, nos entrevues ont montré que le but de la séance était que le Canton forme le conseil à la façon de lire et de comprendre le nouveau format du budget. Cette formation a été donnée sous forme de cours magistral. Les personnes que nous avons interviewées ont été d’accord sur l’objectif de la réunion. Par conséquent, cette première exigence est satisfaite.

25    En ce qui concerne la deuxième exigence, il s’avère nécessaire de déterminer si le conseil a fait avancer de façon importante ses travaux ou sa prise de décision en recevant une formation sur le format du budget. Si le conseil a fait avancer de façon importante ses travaux ou sa prise de décision, la séance de formation ne relève pas de l’exception.

26    Dans un récent rapport à la Municipalité de Casselman, j’ai déclaré que l’expression « faire avancer de façon importante » signifie considérer dans quelle mesure les discussions ont fait avancer les travaux de la municipalité, en fonction d’indicateurs factuels. Les discussions, débats ou décisions qui ont pour but d’aboutir à des résultats spécifiques, ou de persuader les décideur(euse)s d’une manière ou d’une autre sont susceptibles de « faire avancer de façon importante » les travaux ou la prise de décision d’un conseil municipal, d’un comité, ou d’un conseil local[5]. De même, un conseil est susceptible de faire avancer de façon importante les travaux ou la prise de décision quand il vote, conclut un accord, donne des directives ou des informations au personnel, ou discute ou débat d’un projet, d’une ligne de conduite, ou d’une stratégie[6].

27    D’autre part, la simple réception ou l’échange d’information n’est pas susceptible de faire avancer de façon importante les travaux ou la prise de décision, tant qu’il n’y a pas de tentative de discussion ou de débat sur cette information relativement à une question précise qui est ou sera soumise au conseil[7]. J’ai conclu précédemment que cela inclut les séances durant lesquelles le personnel communique simplement des mises à jour sur des activités récentes[8], ou présente les prochaines étapes de procédure[9].

28    Le 28 mai 2022, le conseil du Canton d’Emo a reçu de l’information et une formation sur le nouveau format du budget du Canton. Le conseil n’a ni discuté ni débattu de l’information présentée, et n’a pas voté ou donné de directive au personnel après la séance. Par conséquent, le conseil n’a pas fait avancer de façon importante ses travaux ou sa prise de décision lors de la séance de formation du 28 mai 2022 et l’exception de « l’éducation ou la formation » s’appliquait à la discussion du conseil.

 

Applicabilité de l’exigence de communiquer un avis au public et des autres exigences en vertu de la Loi et du règlement de procédure du Canton

29    Bien que la séance de formation ait satisfait aux exigences de l’exception de « l’éducation ou la formation », elle ne constituait pas une réunion aux fins de la Loi, car elle n’a pas fait avancer de façon importante les travaux ou la prise de décision du conseil. En effet, la définition d’une réunion donnée dans la Loi stipule qu’un quorum des conseiller(ère)s doit faire avancer de façon importante les travaux ou la prise de décision du conseil[10]. Comme la séance n’a pas fait avancer de façon importante les travaux du conseil et ne constituait pas une réunion, les exigences de la Loi et du règlement de procédure du Canton ne s’appliquaient pas.

30    Toutefois, même si la rencontre du Canton d’Emo n’était pas techniquement une réunion aux fins de la Loi et du règlement de procédure du Canton, la décision de dresser le procès-verbal des parties de la séance qui étaient ouvertes au public a accru la transparence des actions du conseil et a facilité l’examen de cette plainte par mon Bureau. Je félicite le Canton d’être allé au-delà des exigences officielles de la Loi et d’avoir communiqué des renseignements supplémentaires au public. À titre de pratique exemplaire, et pour éviter toute confusion et accroître la transparence des actions du conseil, le Canton devrait envisager d’afficher les avis au public et les ordres du jour des séances d’éducation ou de formation, et de consigner les procès-verbaux de ces séances.

 

Opinion

31    Le conseil du Canton d’Emo n’a pas enfreint la Loi de 2001 sur les municipalités ni son règlement de procédure en tenant une séance d’éducation et de formation pour former les membres du conseil au nouveau format du budget, le 28 mai 2022. La séance a satisfait aux exigences de l’exception de « l’éducation ou la formation », car le conseil a reçu une formation sur le nouveau format du budget et n’a pas fait avancer de façon importante ses travaux ou sa prise de décision. Même si cette rencontre ne constituait pas une réunion assujettie aux exigences de la Loi et du règlement de procédure du Canton, j’encourage le Canton à afficher publiquement les avis et les ordres du jour des séances de formation, et à continuer de consigner des procès-verbaux.

 

Rapport

32    La greffière a indiqué que mon rapport serait communiqué au conseil et rendu public lors de la prochaine réunion du conseil. Ce rapport sera également affiché sur notre site Web à www.ombudsman.on.ca.


__________________________
Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario



[1] LO 2001, chap. 25.
[2] Canton d’Emo, règlement no 2019-04, Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletBeing a by-law for governing the calling, place and proceedings of meetings of the Municipal Council for the Township of Emo (5 février 2019), en ligne.
[3] Ombudsman de l'Ontario, Enquête visant à déterminer si le Conseil du Village de Casselman a tenu une réunion à huis clos illégale le 8 janvier 2015, (avril 2015), au par. 54, en ligne.
[4] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur des réunions à huis clos du Conseil du Canton de Russell le 10 août 2015, (janvier 2016), aux par. 18-22 et 68, en ligne.
[5] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une plainte à propos d’une rencontre tenue par les membres du conseil de la Municipalité de Casselman le 27 mai 2021, (août 2022), au par. 26, en ligne.
[6] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une rencontre du conseil du Canton de Pelee le 22 juin 2021, (janvier 2022), au par. 23 [Pelee], en ligne.
[7] Ibid.
[8] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une plainte à propos de séances d’information le 7 mars 2018 avec un quorum des conseillers du Village de Casselman, (août 2018), au par. 40, en ligne.
[9] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur des plaintes à propos de réunions à huis clos tenues par la Ville de Saugeen Shores les 22 juillet, 11 novembre, 25 novembre 2019 et 24 février 2020, (juillet 2020), aux par. 49-50, en ligne.
[10] Pelee, supra note 6 aux par. 30-1.