Entretien avec Diana Cooke, Directrice, Unité des enfants et des jeunes, Ombudsman de l'Ontario (ABO)

octobre 23, 2023

23 octobre 2023

J’ai le plaisir de travailler avec Diana Cooke depuis plusieurs années. Diana dirige l’Unité des enfants et des jeunes de l’Ombudsman Ontario. Auparavant, elle était directrice des services d’intervention au Bureau de l’intervenant provincial en faveur des enfants et des jeunes, où elle a ensuite été directrice des enquêtes. Elle a travaillé auprès des jeunes en relation avec les tribunaux de la jeunesse, les services de protection de l’enfance et les réseaux de refuges d’urgence. Elle détient une maîtrise en service social et une maîtrise en droit.

Laura Pettigrew
Le 23 octobre 2023
Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletAssociation du Barreau de l’Ontario

J’ai le plaisir de travailler avec Diana Cooke depuis plusieurs années. Diana dirige l’Unité des enfants et des jeunes de l’Ombudsman Ontario. Auparavant, elle était directrice des services d’intervention au Bureau de l’intervenant provincial en faveur des enfants et des jeunes, où elle a ensuite été directrice des enquêtes. Elle a travaillé auprès des jeunes en relation avec les tribunaux de la jeunesse, les services de protection de l’enfance et les réseaux de refuges d’urgence. Elle détient une maîtrise en service social et une maîtrise en droit.

Dernièrement, j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec elle au sujet de son parcours auprès des enfants et des jeunes, de son travail de directrice de l’Unité des enfants et des jeunes au Bureau de l’Ombudsman de l’Ontario, et du travail de cette unité. Voici ses réponses aux questions que je lui ai posées lors de notre entretien.

 

QUELS SONT LES POUVOIRS DE L’OMBUDSMAN DE L’ONTARIO EN CE QUI A TRAIT AUX PROBLÈMES TOUCHANT LES ENFANTS ET LES JEUNES?

À la suite de modifications législatives, l’Ombudsman de l’Ontario s’est vu attribuer, le 1er mai 2019, la responsabilité des fonctions d’enquête de l’ancien Bureau de l’intervenant provincial en faveur des enfants et des jeunes. Dans le cadre de ce nouveau mandat, l’Ombudsman peut enquêter sur toute question ayant trait à des services fournis par une société d’aide à l’enfance ou par le titulaire de permis d’un foyer, comme un foyer d’accueil, un foyer de groupe, un centre de traitement, un centre de justice pour la jeunesse ou un centre de traitement en milieu fermé. Plusieurs autres programmes et services offerts aux enfants, aux jeunes et aux familles relèvent aussi de la compétence de l’Ombudsman, y compris les conseils scolaires et les universités, les résidences dans les écoles provinciales et d’application (pour les élèves sourd(e)s, aveugles ou malvoyant(e)s, sourd(e)s et aveugles ou ayant de graves troubles d’apprentissage), les services aux enfants ayant des besoins particuliers complexes, le programme Ontario au travail, les permis de conduire, le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, et les certificats de naissance. L’Ombudsman peut examiner les plaintes reçues et faire enquête à leur sujet de sa propre initiative. Dans l’ensemble, notre compétence sur les affaires touchant les enfants et les jeunes est très solide et plutôt étendue.

Notre Bureau est par ailleurs membre du Conseil canadien des défenseurs des enfants et des jeunes, la section de défense des enfants et des jeunes de l’Ombudsman Association des États-Unis, et nous suivons de près le travail du Réseau européen des Ombudsmans des enfants. Je mentionne ce point pour souligner qu’autour du globe, le travail des commissaires à la protection de l’enfance, de l’Ombudsman des enfants et des intervenant(e)s en faveur des enfants ressemble beaucoup au nôtre, et que nous fonctionnons tous selon des principes communs.

 

POUVEZ-VOUS NOUS PARLER DU PERSONNEL DE L’UNITÉ DES ENFANTS ET DES JEUNES?

Notre unité compte environ 25 personnes, dont la plupart sont agent(e)s de règlement préventif or enquêteur(euse)s. Nous avons aussi un(e) analyste de recherche. Ces personnes ont toutes une expérience pertinente dans des domaines comme le travail social, le droit, le maintien de l’ordre, la santé mentale des enfants, les soins en établissement, la justice, l’épidémiologie et la santé.

Tous les membres de notre personnel ont une solide connaissance de la Loi de 2017 sur les services à l’enfance, à la jeunesse et à la famille, du secteur ontarien des services à l’enfance, de la Convention relative aux droits de l’enfant de l’Organisation des Nations Unies et de la Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis. De plus, toute l’équipe a suivi une formation sur les droits de l’enfance et à la conduite d’évaluations d’impact sur les droits de l’enfant.

Nous collaborons avec d’autres secteurs opérationnels du Bureau, notamment les Services juridiques, l’Unité des services en français et l’Unité générale.

 

COMMENT PEUT-ON JOINDRE L’UNITÉ DES ENFANTS ET DES JEUNES?

Notre Unité a ses propres numéros de téléphone (appel local ou sans frais) et sa propre adresse courriel, mais la plupart des gens nous appellent. Nos agent(e)s de règlement préventif sont habituellement le premier point de contact; ils(elles) répondent aux appels et sont très habiles pour résoudre les problèmes et aiguiller les gens vers les bonnes ressources.

En règle générale, nous veillons à ce que la personne concernée ait épuisé les mécanismes de traitement des plaintes avant d’intervenir plus directement. La Loi de 2017 sur les services à l’enfance, à la jeunesse et à la famille prévoit plusieurs avenues de traitement des plaintes ou de recours : société d’aide à l’enfance, placement de l’enfant à l’extérieur du domicile, Commission de révision des services à l’enfance et à la famille, Comité consultatif sur les placements en établissement, Commission de révision des placements sous garde, programmes de soins, révision du statut de l’enfant ou règlement extrajudiciaire des différends. Nos agent(e)s de règlement préventif sont à l’écoute des problèmes et tâchent de trouver la meilleure solution. Si aucune solution n’est possible avec les ressources locales, alors dans bien des cas, nous allons plus loin dans le dossier, notamment en nous procurant des documents et en adressant nous-mêmes des demandes à qui de droit. Il arrive que nous entamions une enquête formelle.

Bien des fois, ce sont les parents de l’enfant ou des membres de sa parenté qui nous appellent, mais nous recevons aussi des appels de la police, d’avocat(e)s et d’autres professionnel(le)s, de parents de famille d’accueil, d’intervenant(e)s auprès de jeunes en transition, et parfois de lanceur(euse)s d’alerte. La police s’adresse souvent à nous au sujet de jeunes touché(e)s par la traite des personnes ou de conditions dans les foyers de groupe ou d’accueil. Il arrive que des avocat(e)s et des intervenant(e)s auprès de jeunes en transition appellent au sujet de jeunes s’étant vu refuser les services d’une société d’aide à l’enfance ou un placement dans un hôtel ou motel. Parfois aussi, des parents de famille d’accueil appellent pour signaler qu’on ne répond pas aux besoins d’un(e) enfant.

Au cours du dernier exercice, notre Bureau a reçu 1 678 plaintes au sujet d’enfants et de jeunes pris(e)s en charge, dont 279 déposées par des jeunes. Quand l’appel vient d’un(e) enfant ou d’un(e) jeune, nous suivons leur cas de près pour nous assurer que leurs droits sont respectés, que leur voix est entendue et que leurs plaintes sont traitées adéquatement.

 

DE QUELLE FAÇON INFORME-T-ON LES ENFANTS ET LES JEUNES AU SUJET DE L’OMBUDSMAN?

Selon la Loi de 2017 sur les services à l’enfance, à la jeunesse et à la famille et la Loi sur l’ombudsman, les fournisseurs de services ont l’obligation d’informer les enfants et les jeunes pris(e)s en charge (y compris les jeunes sous garde) au sujet de notre Bureau et des façons de nous joindre. Ils sont aussi tenus de leur donner la liberté de communiquer avec nous à titre confidentiel.

Toutefois, nous prenons nous-mêmes contact avec les jeunes dans les foyers de groupe, les foyers d’accueil, les centres de traitement et les établissements de garde en milieu fermé pour nous assurer qu’ils(elles) connaissent l’Ombudsman de l’Ontario, leurs droits et les façons de nous joindre. Nous les rencontrons habituellement en privé, individuellement, afin qu’ils(elles) puissent nous parler librement de leurs préoccupations.

De plus, nous rencontrons régulièrement la Foster Parents Society of Ontario, les intervenant(e)s auprès des jeunes en transition et l’Ontario Association of Child and Youth Workers pour en savoir plus sur les tendances que ces organismes et personnes voient se dessiner et pour encourager leurs membres à aider les jeunes à communiquer avec nous lorsqu’un problème survient.

Nous avons aussi sur notre site Web des présentations adaptées aux enfants, y compris des vidéos, qui expliquent la vocation de notre Bureau et l’aide que nous offrons.

Outre nos visites régulières aux enfants et aux jeunes des foyers de groupe et des foyers d’accueil, nos quatre équipes de sensibilisation spécialisées travaillent auprès des enfants et des jeunes surreprésenté(e)s dans le système de protection de l’enfance ou particulièrement vulnérables, et auprès des familles. Il s’agit du Cercle autochtone, de la Table des enfants, des jeunes et des familles noir(e)s, de l’équipe de sensibilisation 2SLGBTQ+ et du tout récent groupe de liaison avec les écoles provinciales et d’application. Ces équipes ont pour tâche principale de prendre contact avec les enfants, les jeunes, les familles et, à l’occasion, les fournisseurs de services, pour les consulter au cas par cas et prendre connaissance des dossiers individuels portés à notre attention dans le cadre du système d’avis de décès ou de lésion corporelle grave.

Notre Cercle autochtone a les ressources nécessaires pour intégrer les pratiques culturelles autochtones à son travail, notamment la purification, l’emploi de la Plume d’aigle et la participation des Aîné(e)s. Nos brochures sont aussi disponibles en cri, en ojibwé et en oji-cri.

 

QU’EST-CE QUE LE SYSTÈME D’AVIS DE DÉCÈS OU DE LÉSION CORPORELLE GRAVE?

Selon les règlements d’application de la Loi sur l’ombudsman, les sociétés d’aide à l’enfance et les titulaires de permis de services en établissement doivent informer le Bureau de l’Ombudsman quand ils(elles) prennent connaissance d’un décès ou d’une lésion corporelle grave d’un(e) enfant ayant reçu des services d’une société d’aide à l’enfance dans les 12 mois précédents. L’Unité des enfants et des jeunes a une équipe spécialisée chargée d’examiner ces rapports sur une base hebdomadaire pour déceler les problèmes systémiques ou repérer les cas nécessitant un suivi. Cette équipe rencontre chaque mois le personnel de l’Unité de l’examen et de l’analyse des décès d’enfants et d’adolescents du Bureau du coroner en chef pour discuter des questions préoccupantes et recenser les cas de décès qui n’ont pas été déclarés à l’Ombudsman. Les enquêtes sur les décès sont effectuées par le(la) coroner, mais une fois qu’elles sont terminées, nous pouvons faire d’autres demandes de renseignements ou ouvrir une enquête si les services fournis par la société d’aide à l’enfance ou le fournisseur agréé(e) de services en établissement soulèvent encore des préoccupations.

 

POUVEZ-VOUS DONNER DES EXEMPLES D’ENQUÊTES FORMELLES DE L’OMBUDSMAN SUR DES PROBLÈMES TOUCHANT LES ENFANTS ET LES JEUNES?

Ces dernières années, l’Ombudsman a publié trois rapports d’enquête ayant trait à des problèmes touchant directement des enfants et des jeunes : Occasions perdues, Une voix inécoutée : L’histoire de Brandon et Disparue dans l’indifférence : L’histoire de Misty. En bref, il s’agit d’enquêtes sur la fermeture de programmes de garde et de détention dans deux établissements pour jeunes du Nord de l’Ontario; le cas d’un garçon de 10 ans arrêté par la police après une omission d’intervenir de la société d’aide à l’enfance; et le cas d’une fille de 13 ans placée à des milliers de kilomètres de sa communauté d’origine et portée disparue pendant 19 jours. La première de ces enquêtes était une collaboration entre l’Unité générale et l’Unité des enfants et des jeunes.

Dans Occasions perdues, l’Ombudsman a formulé 16 recommandations, notamment une pour que le ministère des Services à l’enfance et des Services sociaux et communautaires s’assure que son personnel connaît sa politique sur les jeunes personnes transgenres et consulte les jeunes s’identifiant comme personnes transgenres avant toute prise de décision sur leur placement.

Dans Une voix inécoutée : L’histoire de Brandon, l’Ombudsman a fait 18 recommandations visant l’amélioration de la conformité des sociétés d’aide à l’enfance aux exigences réglementaires et aux normes ontariennes de protection de l’enfance, ainsi que l’amélioration de leurs services de protection de l’enfance. Par exemple, une recommandation soulignait l’importance de rencontrer les enfants en privé, conformément aux normes.

Enfin, dans Disparue dans l’indifférence : L’histoire de Misty, l’enquête portait sur trois organismes. L’Ombudsman y a formulé 58 recommandations, notamment la nécessité pour les sociétés d’aide à l’enfance et les agences de placement d’obtenir une copie du permis d’établissement du fournisseur de services et des conditions de ce permis, avant de placer l’enfant dans un établissement.

Depuis leur parution, je constate que ces rapports ont servi d’outils d’apprentissage ailleurs que dans les organismes ayant été associés aux enquêtes. Et c’est l’un des objectifs de la publication de nos rapports et des recommandations : opérer des changements positifs dans l’ensemble du système.

 

QUELS SONT VOS LIENS AVEC LE MINISTÈRE DES SERVICES À L’ENFANCE ET DES SERVICES SOCIAUX ET COMMUNAUTAIRES?

L’Ombudsman est indépendant des ministères et des autres entités sous sa surveillance. Toutefois, notre Bureau travaille régulièrement avec des organismes gouvernementaux pour discuter activement des tendances et promouvoir l’amélioration du système. Tous les mois, nous rencontrons des représentant(e)s du ministère des Services à l’enfance et des Services sociaux et communautaires pour repérer et résoudre les problèmes avant qu’ils ne s’aggravent. De plus, nous rédigeons des mémoires et adressons des recommandations au gouvernement sur les lois et les politiques qui touchent les enfants et les familles. Tout récemment, nous avons signé un mémoire dans le cadre de l’examen quinquennal de la Loi de 2017 sur les services à l’enfance, à la jeunesse et à la famille. Au nombre des questions abordées : l’importance que les jeunes reçoivent de l’information exacte sur leurs droits à une entente sur les services volontaires pour les jeunes, sur leur admissibilité au programme À vos marques, prêts, partez et sur le fait que nous sommes là pour les aider en cas de doutes liés à l’accès à ces programmes.

 

AVEZ-VOUS AUTRE CHOSE À DIRE À NOTRE LECTORAT?

Quand je parle de notre Unité, je m’assure que mon auditoire comprend les messages clés suivants à propos de notre travail.

Nous :

  • travaillons dans l’intérêt supérieur des enfants;

  • recevons, traitons et résolvons les plaintes;

  • enquêtons lorsque c’est nécessaire et publions les rapports et les recommandations de nos enquêtes;

  • promouvons et protégeons les droits des jeunes;

  • vérifions l’efficacité des mécanismes de plainte utilisés par les enfants et les jeunes;

  • rencontrons les enfants et les jeunes pris(e)s en charge pour les informer de leurs droits;

  • faisons de la sensibilisation auprès des familles, des fournisseurs de services et des organismes communautaires pour les informer des droits des enfants, de notre Bureau et de nos mécanismes d’aide;

  • administrons le système d’avis de décès ou de lésion corporelle grave;

  • adressons des recommandations au gouvernement pour des améliorations bénéficiant aux enfants et aux jeunes de l'Ontario.


Pour en savoir plus sur le travail de l’Unité des enfants et des jeunes, consulter la page Web de l’Unité sur le site de l’Ombudsman de l’Ontario.
 



Cet article a initialement paru sur la page des articles sur la Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletSection du droit des enfants et des jeunes de l’Association du Barreau de l’Ontario.