Soins anti-cancer hors du pays : L’énigme « hors du pays »

Soins anti-cancer hors du pays : L’énigme « hors du pays »

juillet 20, 2006

20 juillet 2006

Le ministère de la Santé a procédé à une refonte complète de son programme de financement des soins hors du pays et a payé 75 000 $ à une patiente en chimiothérapie qui s’était vu refuser injustement le paiement de ses traitements.

Le ministère de la Santé a procédé à une refonte complète de son programme de financement des soins hors du pays et a payé 75 000 $ à une patiente en chimiothérapie qui s’était vu refuser injustement le paiement de ses traitements.

Aucun rapport n'a été publié.

 

Mise à jour - Rapport annuel 2007-2008

Quand Suzanne Aucoin s’est adressée au Bureau de l’Ombudsman en 2007, elle livrait deux batailles : elle refusait de se laisser vaincre par un cancer colectoral en phase quatre et elle revendiquait un remboursement de l’Assurance-santé de l’Ontario pour un traitement subi à Buffalo, dans l’État de New York – remboursement qui relevait de la prise en charge des soins de longue durée hors du pays.

L’enquête de l’EISO sur la situation de Mme Aucoin et sur le programme de traitements hors du pays a conclu que les formulaires et les procédures de l’Assurance-santé de l’Ontario étaient tout à fait incompréhensibles, même pour les médecins, que cet organisme donnait très peu d’explications sur ses décisions et qu’il omettait de communiquer des renseignements fondamentaux aux patients comme à leurs praticiens. L’Ombudsman a comparé la manière dont cet organisme traitait les patients au casse-tête du cube de Rubik – les patients devaient se débrouiller seuls pour comprendre le système.

L’Ombudsman a recommandé que l’Assurance-santé rembourse à Mme Aucoin ses frais médicaux et juridiques, d’un montant total de 76 000 $. Il a aussi préconisé une refonte de l’ensemble du programme. Le Ministère s’est dit d’accord. L’affaire ayant ainsi été résolue, aucun rapport officiel n’a été présenté.

Le Ministère a engagé deux conseillers externes, qui ont achevé leur examen du programme à l’été 2007. Un exemplaire de leur rapport a été remis à l’Ombudsman. Les changements apportés depuis comprennent une mise à jour du site Web pour donner des renseignements plus clairs et plus détaillés sur le programme de traitements hors du pays, aux patients et aux médecins. Le Ministère a aussi modifié la lettre qu’il envoie aux médecins quand ceux-ci présentent une demande au nom de leurs patients. De plus, il donne maintenant des raisons plus claires et des explications plus complètes en cas de refus. Et des renseignements actualisés sur le programme ont été envoyés aux médecins, aux hôpitaux, aux cliniques et aux laboratoires dans un bulletin de l’Assurance-santé.

Malheureusement, Mme Aucoin a perdu sa bataille contre le cancer en novembre 2007. « Sa contestation du système a mené à des changements qui se sont révélés beaucoup plus vastes et beaucoup plus profonds qu’elle ne l’aurait imaginé, je crois », a déclaré l’Ombudsman lors d’un hommage à Mme Aucoin, dans le St. Catharines Standard, le journal de sa ville. « Elle avait vraiment le sentiment d’avoir confronté le système et d’avoir accompli quelque chose... À mon avis, elle a évité à bien des gens l’agonie d’un passage dans ce labyrinthe de la bureaucratie. »

 

Mise à jour - Rapport annuel 2006-2007

Le 23 novembre 2006, l’Ombudsman a avisé le ministère de la Santé et des Soins de longue durée qu’il avait l’intention de faire enquête sur le cas de Suzanne Aucoin, qui s’était vu refuser le remboursement d’un traitement anticancéreux par le programme ontarien des services de santé hors du pays.

Mme Aucoin avait reçu un diagnostic de cancer du côlon de stade 1 en juin 1999, alors qu’elle avait 28 ans. Elle avait subi une opération chirurgicale et les médecins l’avaient assurée alors qu’elle était guérie. Mais en octobre 2003, elle avait appris que le cancer était revenu, avait empiré jusqu’au stade 4 et était considéré incurable. Les médecins lui avaient dit qu’elle pourrait vivre 22 mois avec une chimiothérapie, mais seulement un an sans. En novembre 2004, Mme Aucoin avait commencé un traitement à l’Avastin, médicament anticancéreux qu’elle s’était procuré à ses propres frais auprès d’un spécialiste du cancer à Buffalo, dans l’État de New York. Le fabricant de ce médicament lui avait remboursé deux tiers des frais pour des raisons de compassion, mais elle avait dû débourser près de 20 000 $US.

En septembre 2005, Santé Canada a approuvé un autre médicament anticancéreux, l’Erbitux. Mme Aucoin a appris qu’un certain nombre de patients atteints de cancers colorectaux en Ontario avaient obtenu le remboursement de leur traitement à l’Erbitux aux États-Unis. Son oncologue a présenté une demande de prise en charge à l’Assurance-santé pour un traitement hors du pays à l’aide d’un « cocktail » de médicaments qui comprenait de l’Erbitux. Mais le Ministère a rejeté cette demande, disant que le traitement proposé n’était pas accepté en général en Ontario et qu’il restait considéré expérimental. Le Ministère a aussi précisé que ce médicament était légalement disponible en Ontario. Mme Aucoin et son médecin ne voyaient pas comment l’Erbitux pouvait être déclaré « expérimental » étant donné qu’il était couramment utilisé aux États-Unis – et que le Ministère le remboursait déjà à d’autres patients. Et bien que Santé Canada ait approuvé l’Erbitux, le fabricant de ce médicament avait décidé de ne pas le vendre au Canada. On ne pouvait donc pas le trouver en Ontario.

Mme Aucoin a fait appel de cette décision à la Commission d’appel et de révision des services de santé, mais elle a décidé de ne pas remettre à plus tard sa chimiothérapie. Comme elle le dit, « le cancer n’attend pas ». Elle est donc retournée voir son spécialiste du cancer dans sa clinique privée de Buffalo, et a payé son traitement avec son argent et celui recueilli par un groupe de ses proches. Son traitement coûtait environ 10 000 $ de moins par mois que s’il avait été dispensé au Roswell Park Cancer Institute à Buffalo, où des patients cancéreux de l’Ontario recevaient des traitements à l’Erbitux remboursés par le Ministère. En mars 2006, le médecin de Mme Aucoin a fait une nouvelle demande de remboursement pour un traitement hors du pays, mais cette fois uniquement pour l’Erbitux. Et cette fois, le Ministère a accepté de financer huit semaines de traitement à Roswell Park.

En novembre 2006, la Commission d’appel et de révision des services de santé a rejeté l’appel de Mme Aucoin. Mais la Commission ne prétendait plus que son traitement à l’Erbitux aux États-Unis était expérimental. Cette fois, la Commission disait que la demande était rejetée parce que Mme Aucoin n’avait pas obtenu ce traitement dans un établissement de santé agréé, c’est-àdire dans un hôpital.

Il a fallu environ deux mois aux enquêteurs de l’EISO pour procéder aux entrevues avec Mme Aucoin et son avocat, son oncologue, les responsables du Ministère, et pour étudier les textes de loi et les documents ministériels pertinents. L’Ombudsman a conclu que si le Ministère avait avisé correctement Mme Aucoin et son médecin des raisons du refus de sa demande, elle n’aurait pas dépensé les sommes considérables nécessitées par un traitement médical pour prolonger sa vie, ni engagé de frais juridiques pour en appeler de la décision. De plus, l’Ombudsman a conclu que le Ministère n’avait pas communiqué aux médecins et au public certains renseignements fondamentaux sur la prise en charge des traitements hors du pays. Il a déclaré publiquement que la façon dont le Ministère avait traité Mme Aucoin et d’autres patients atteints de cancer revenait à leur mettre dans les mains un « cube de Rubik » et à les forcer de trouver seuls la solution.

L’Ombudsman a recommandé que Mme Aucoin soit remboursée de toutes les dépenses qu’elle avait faites à la suite du refus de sa demande. Il a aussi recommandé que le Ministère procède à un examen de son programme d’assurance des services de santé hors du pays et qu’il y apporte les améliorations voulues pour que les décisions prises reposent sur des normes cohérentes et bien définies, et pour que les médecins et leurs patients soient informés clairement et précisément des raisons des réponses à leurs demandes.

Le Ministère a accepté toutes les recommandations de l’Ombudsman et a convenu de l’informer régulièrement des progrès réalisés dans leur mise en oeuvre. De plus, il a immédiatement remboursé la somme de 76 000 $ à Mme Aucoin pour ses frais médicaux et juridiques. Le 30 janvier 2007, le Ministère a publié un  communiqué de presse déclarant : « À la suite de l’enquête de l’Ombudsman, le Ministère a accepté de rembourser les dépenses de Mme Aucoin. Lorsqu’il a informé Mme Aucoin de cette décision, le sous-ministre, parlant au nom du Ministère de la Santé et des soins de longue durée, lui a présenté des excuses pour les difficultés qu’elles avait vécues à tenter de régler ce problème. » Le sous-ministre lui a personnellement remis son chèque de remboursement. La question étant ainsi résolue, l’Ombudsman a décidé de ne pas publier de rapport officiel.

Le Ministère a également annoncé un examen exhaustif de son programme d’assurance des services de santé hors du pays, devant être achevé au printemps de 2007. Alors que nous rédigeons ce rapport, cet examen se poursuit. Deux conseillers externes engagés par le Ministère pour procéder à cet examen ont fait des entrevues avec l’Ombudsman et les cadres supérieurs de son bureau.