Kelly Burke, un rapport à l'image d'une année compliquée (Le Droit)

décembre 13, 2021

13 décembre 2021

C'est désormais un classique depuis plusieurs années. Le rapport du Commissariat aux services en français met en lumière les attentes et frustrations de la part des Franco-Ontariens au sujet de leurs services gouvernementaux. À cet égard, l'augmentation de 15%des plaintes sur le bureau de Kelly Burke, interpelle.

Sébastien Pierroz
Le Droit
le 13 décembre 2021

C'est désormais un classique depuis plusieurs années. Le rapport du Commissariat aux services en français met en lumière les attentes et frustrations de la part des Franco-Ontariens au sujet de leurs services gouvernementaux. À cet égard, l'augmentation de 15%des plaintes sur le bureau de Kelly Burke, interpelle.

Certes, le nombre absolu de plaintes est passé de 431 à 351, mais l’étude précédente de la commissaire aux services en français, et adjointe à  l'ombudsman, couvrait une période de 17 mois, contre une période d'un an pour le présent rapport.

Les raisons sont évidentes : la pandémie a multiplié les attentes des francophones à  l'égard des services en français. D'ailleurs, plus de 15% des plaintes concernent directement le ministère de la Santé.

« Cette année, en raison de la vaccination contre la COVID-19, nous avons observé à l'impact dévastateur des limites de la Loi des services en français sur l'expérience vécue par les francophones », a fait savoir Mme Burke.

Comme l'an passé, les communications gouvernementales sont les principales réclamations. Les bureaux de santé qui ne sont pas tenus d'offrir des services de santé en français constituent bien une faille.

Ce rapport à l'image de 2021 prend aussi sa source dans la crise de l'Université Laurentienne. Les coupes draconiennes du printemps, avec la suppression de 28 programmes en franais, ont laissé des cicatrices évidentes. Au total, 60 plaintes ont été formulées contre le cam-pus sudburois.

Alors que l'Université demeure toujours sous supervision judiciaire en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC), la vérificatrice générale de la province se bute à  l'établissement qui refuse de lui transmettre certaines informations privilégiées, dans le cadre de son enquête sur la situation financière à l'université.

Toujours est-il que ce deuxième rapport de Mme Burke depuis sa prise de fonctions en janvier 2020 est marqué par le peu de recommandations. Dans le docu-ment de 50 pages, la défenseure aux services en français mise surtout sur l'utilisation d'un nouvel outil nommé Boussole CSEF pour faciliter le suivi des plaintes.
En réalité, la stratégie n'est pas mauvaise. En ciblant davantage sur une recommandation plutôt que sur plusieurs, le bureau de l'ombudsman met ses œufs dans le même panier.

Les précédents rapports annuels de l'ex-commissaire aux services en français, François Boileau, avaient montré toute la difficulté d'obtenir des résultats en tapant sur les mêmes clous, comme l'immigration francophone, les accents aigus sur les documents administratifs, ou encore une meilleure planification des ex-entités de planification.

En revanche, des rapports plus ciblés comme celui de 2012 sur l’état du post-secondaire en français avaient permis par la suite de jeter les bases d’une université de langue française à Toronto.

Accueillie froidement lors de sa nomination il y a deux ans, Kelly Burke, dont le poste résulte de la suppression du Commissariat aux services en français comme organe indépendant, a réussi peu à peu à rassurer les Franco-Ontariens. En témoigne par exemple en début d’année, sa sortie publique musclée pour demander au gouvernement ontarien des communications bilingues « et sans délai ». Toujours est-il qu'aucune mention au retour de l'indépendance de la commissaire, pourtant réclamée par l'opposition politique à Queen's Park, ne figure dans le projet gouvernemental de modernisation de la Loi sur les services en français, présenté le mois dernier.

La crise à la Laurentienne et l'ampleur de pandémie ont mis de côté cet enjeu, sans qu'on ne puisse encore mesurer les bienfaits ou limites d'une commissaire affiliée à l'ombudsman. Les priorités semblent ailleurs.