Canton de Morley

Canton de Morley

novembre 23, 2023

23 novembre 2023

L’Ombudsman a examiné une plainte au sujet d’une rencontre tenue le 14 décembre 2022 ayant atteint le quorum des membres du Conseil du Canton de Morley. Selon cette plainte, cette rencontre constituait une réunion tenue en contravention des règles des réunions publiques prévues par la Loi de 2001 sur les municipalités.

L’Ombudsman a conclu que le Canton a contrevenu aux règles prévues par la Loi le 14 décembre 2022. Les membres du Conseil, qui constituaient aussi le quorum du comité permanent de la voirie et des services publics, ont discuté dans un garage du Canton avec quelqu’un du personnel concernant les activités de déneigement et fait avancer de façon importante les travaux et la prise de décision du Canton. En omettant de traiter cette rencontre comme une réunion assujettie aux règles des réunions publiques, le Canton a contrevenu aux exigences de la Loi de 2001 sur les municipalités concernant les réunions publiques.

Enquête sur une plainte à propos d’une réunion des membres du Conseil du Canton de Morley tenue le 14 décembre 2022

Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario

Novembre 2023

 

Plainte

1    Mon Bureau a reçu une plainte à propos d’une rencontre entre des membres du Conseil et une personne membre du personnel du Canton de Morley (le « Canton ») qui a eu lieu dans un garage appartenant au Canton le 14 décembre 2022. Il est allégué dans la plainte que cette rencontre constitue une réunion tenue en contravention des règles des réunions publiques énoncées dans la Loi de 2001 sur les municipalités (la « Loi »)[1].

2    Mon enquête a révélé que le Canton de Morley a contrevenu aux règles des réunions publiques le 14 décembre 2022 en ne traitant pas la rencontre comme une réunion assujettie à ces règles.

 

Compétence de l’Ombudsman

3    La Loi dispose que toutes les réunions d’un conseil ou d’un conseil local et de leurs comités doivent être ouvertes au public, sauf si les exceptions prévues par la Loi s’appliquent.

4    Depuis le 1er janvier 2008, la Loi accorde à quiconque le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité ou un conseil local a respecté ou non la Loi en se réunissant à huis clos. La Loi fait de l’Ombudsman l’enquêteur par défaut pour les municipalités qui n’ont pas désigné le(la) leur.

5    L’Ombudsman enquête sur les réunions à huis clos du Canton de Morley.

6    Lorsque nous enquêtons sur des plaintes concernant des réunions à huis clos, nous cherchons à savoir si les exigences de réunions publiques énoncées dans la Loi et dans le règlement d’application pertinent ont été respectées.

7    Depuis 2008, mon Bureau a enquêté sur des centaines de réunions à huis clos. Pour aider les conseils municipaux, le personnel municipal et le public, nous avons créé un recueil en ligne des cas de réunions publiques. Nous avons créé ce recueil interrogeable pour permettre aux intéressé(e)s d’accéder facilement aux décisions de l’Ombudsman et à ses interprétations des règles des réunions publiques. Les membres du Conseil et le personnel peuvent consulter ce recueil pour éclairer leurs discussions et leurs décisions afin de déterminer si certaines questions devraient ou pourraient être discutées à huis clos, ainsi que pour examiner les questions liées aux procédures des réunions publiques. Des résumés des décisions antérieures de l’Ombudsman sont consultables dans ce recueil : https://www.ombudsman.on.ca/digest/recueil-de-cas-reunions-municipales-accueil.

 

Processus d’enquête

8    Le 26 avril 2023, mon Bureau a avisé le Canton de Morley de son intention d’enquêter sur cette plainte.

9    Mon Bureau a pris connaissance du règlement de procédure du Canton et des passages pertinents de la Loi. Nous avons aussi passé en revue les procès-verbaux des réunions ayant précédé et suivi la rencontre, et le règlement sur les nominations aux comités.

10    Mon Bureau s’est entretenu avec la greffière-trésorière, la greffière-trésorière adjointe, le préfet et deux conseillers.

11    Nous avons bénéficié d’une pleine et entière coopération dans ce dossier.

 

Renseignements généraux

12    Le Canton de Morley est une municipalité à palier unique comptant moins de 500 personnes. Son Conseil se compose d’un(e) préfet(ète) et de quatre conseiller(ère)s, et son personnel comprend habituellement un(e) employé(e) à temps partiel et deux à temps plein.

13    Après les élections municipales de 2022, le Canton a adopté un nouveau règlement sur les nominations aux comités. Ce règlement a pour effet de nommer le préfet à chaque comité, et deux conseillers au comité permanent de la voirie et des services publics (le « Comité de la voirie »). Par conséquent, le Comité de la voirie comptait trois membres, tous récemment élus au moment de la réunion alléguée tenue en décembre 2022.

14    Lors d’une réunion ordinaire du Conseil tenue le 12 décembre 2022, le surintendant des travaux publics à cette date a présenté au Conseil un état des lieux sur différentes questions et quitté la réunion peu après. Pendant la discussion ayant suivi son départ, les membres du Conseil ont constaté qu’il restait des questions à lui poser au sujet des activités générales de déneigement, notamment sa charge de travail, à l’heure où une forte averse de neige était annoncée. Le Conseil a convenu que les trois membres du Comité de la voirie se réuniraient avec le surintendant des travaux publics dans les jours suivants pour discuter des activités additionnelles de déneigement et des niveaux de service que nécessiterait la chute de neige attendue.

15    Mon Bureau a été informé que les trois membres du Conseil avaient convenu de s’entretenir officiellement avec le surintendant le 12 décembre, avant qu’il passe aux activités de déneigement le 14 décembre 2022. On nous a précisé que les conseillers estimaient que cet entretien ne constituait ni une réunion du Conseil ni une réunion du Comité de la voirie.

 

Réunion du 14 décembre 2022

16    Le 14 décembre 2022, vers 7 heures, le préfet a rencontré le surintendant des travaux publics au bureau du Canton et fait savoir que deux autres membres du Conseil se joindraient à eux. Ni la greffière-trésorière ni la greffière-trésorière adjointe étaient présentes.

17    Aux environs de 7 h 5, les trois membres du Conseil et le surintendant se sont entretenus dans le garage adjacent au bureau du Canton. Il était question de savoir si le surintendant disposait de conducteur(trice)s de chasse-neige supplémentaires sur appel en vue de la chute de neige à venir. Les conseillers ont posé des questions sur le processus courant de recrutement des conducteur(trice)s supplémentaires.

18    Mon Bureau a été informé que lors de cet entretien, ils avaient abordé d’autres questions ayant trait au déneigement et aux travaux publics, y compris les heures de travail du surintendant et la certification et la formation en sécurité nécessaires pour opérer le matériel de déneigement du Canton.

19    Nous avons entendu différentes durées estimatives de la discussion, mais selon la plupart des indications, elle aurait été de moins d’une demi-heure, car tous avaient convenu que le surintendant des travaux publics devait aller déneiger.

20    Après cet entretien, le surintendant est allé déneiger, et les trois membres du Conseil sont entrés dans le bureau du Canton. Le préfet a alors téléphoné à un conducteur figurant sur la liste des conducteur(trice)s de chasse-neige en disponibilité (le « conducteur supplémentaire »), qui s’est dit disponible et disposé à rencontrer le surintendant immédiatement dans un autre garage municipal pour prêter main-forte à l’équipe de déneigement.

21    Après avoir tenté de joindre le surintendant par radio et téléphone, les deux conseillers se sont mis à sa recherche pour lui communiquer cette information en personne. Le préfet est resté au bureau du Canton, puis est rentré chez lui. Par la suite, les deux conseillers, le surintendant et le conducteur supplémentaire se sont rencontrés dans un autre garage municipal. Peu après, le conducteur supplémentaire et le surintendant sont chacun allés déneiger différents secteurs du Canton, et les deux conseillers ont quitté le garage entre 9 h et 10 h.

22    La greffière-trésorière a dit à mon Bureau avoir, après cet entretien, rappelé aux membres du Conseil les procédures à suivre pour les décisions d’embauche. L’administration du Canton a aussi réexaminé les rôles, les pratiques et la structure des comités du Conseil.

 

Analyse

23    Le paragraphe 238(1), la Loi de 2001 sur les municipalités énonce un critère à deux volets pour établir si une rencontre répond à la définition de « réunion » au sens de la Loi. Une réunion ordinaire, extraordinaire ou autre d’un conseil, d’un conseil local ou d’un comité constitue une « réunion » quand : i) le quorum est atteint, et ii) les membres discutent ou traitent autrement d’une question d’une manière qui fait avancer de façon importante les travaux ou la prise de décision du conseil ou du comité.

24    Trois des cinq membres du Conseil étaient présents le matin du 14 décembre 2022. Ces trois personnes représentaient à elles seules l’ensemble du Comité de la voirie[2]. Par conséquent, le quorum était atteint et pour le Conseil et pour le comité.

25    Quant au second critère, il s’agit de déterminer si la rencontre du 14 décembre 2022 a fait avancer de façon importante les travaux ou la prise de décision du Canton.

26    Dans un rapport adressé en 2022 à la Municipalité de Casselman, j’ai fait la déclaration suivante :

[…] pour interpréter l’expression « fait avancer de façon importante » il faut examiner dans quelle mesure les discussions ont fait avancer les travaux de la municipalité, en fonction d’indicateurs factuels.

Les discussions, les débats ou les décisions qui visent à obtenir des résultats précis, ou à persuader les décideurs d’une façon ou d’une autre, sont susceptibles de « faire avancer de façon importante » les travaux ou la prise de décision d’un conseil municipal, d’un comité ou d’un conseil local. Il est peu probable que le simple fait de recevoir ou d’échanger de l’information « fasse avancer de façon importante » les travaux ou la prise de décision, tant qu’il n’y a pas de tentative de discuter ou de débattre de cette information relativement à une question précise qui est soumise, ou sera soumise, à un conseil municipal, à un comité ou à un conseil local[3].


27    J’ai de plus précédemment constaté qu’un conseil municipal est susceptible de faire avancer de façon importante ses travaux ou sa prise de décision s’il vote, conclut une entente, donne des directives ou fait des commentaires au personnel, ou encore discute ou débat d’une proposition, d’une action ou d’une stratégie[4]. En revanche, les activités suivantes ne font pas avancer de façon importante les travaux ou la prise de décision d’un conseil ou sont peu susceptibles de le faire :

  • Discuter d’options de procédure[5];

  • Recevoir des mises à jour sur de récentes activités ou communiquer de l’information[6];

  • Recevoir de l’information susceptible d’aider le Conseil à mieux comprendre les affaires de la municipalité, ou à acquérir des compétences[7].


28    En 2022, dans une lettre à la Municipalité de St.-Charles[8], j’ai examiné la plainte concernant une rencontre informelle entre deux membres du Conseil composant le Comité des services environnementaux. Ces deux personnes ont rencontré des résident(e)s pour discuter de préoccupations concernant la collecte des ordures et demandé qu’une personne membre du personnel participe à la discussion pour donner de l’information, ce qu’elle a fait. Aucune décision n’a été prise, et la discussion est restée de nature informative. Le Comité n’a pas tenu d’autres rencontres, et la question n’a pas été portée à l’attention du Conseil. Par conséquent, j’ai conclu que cette rencontre n’avait pas fait avancer de façon importante les travaux et ne constituait donc pas une « réunion ».

29    Dans le cas qui nous occupe, le Conseil, à sa réunion du 12 décembre 2022, soit avant la rencontre du 14 décembre 2022, avait expressément convenu que le Comité de la voirie rencontrerait le surintendant des travaux publics pour discuter de questions d’intérêt du Conseil, y compris de préoccupations ayant trait à une prévision de chute de neige. À cet effet, les membres du Conseil faisant partie du Comité de la voirie ont rencontré le surintendant dans le garage municipal le 14 décembre 2022 pour discuter du déneigement. Après, ils ont aussi communiqué avec un autre conducteur de chasse-neige et se sont entendus avec lui pour qu’il participe au déneigement le même jour. Ces actions ont fait avancer de façon importante les travaux et la prise de décision du Canton.

30    Par conséquent, la rencontre du 14 décembre 2022 était une réunion du Canton qui aurait dû se dérouler conformément aux règles des réunions publiques. Le Canton n’a pas rempli ces règles, car il n’a pas communiqué d’avis, ni tenu de procès-verbal ni suivi les autres procédures de réunion.

 

Avis

31    Je reconnais toutefois que le Canton de Morley est une petite municipalité dont les ressources sont limitées, et que le Conseil faisait tout ce qu’il pouvait pour réagir à l’annonce d’une forte chute de neige. Cependant, la rencontre du 14 décembre 2022, où étaient présents trois membres du Conseil du Canton, s’est tenue en contravention des règles des réunions publiques prévues dans la Loi de 2001 sur les municipalités. Je me réjouis de constater que le Canton a déjà commencé à adopter des mesures pour répondre à ces préoccupations, et je félicite le Conseil de son souci constant de responsabilisation et de transparence.

 

Recommandations

32    Je fais les recommandations suivantes afin d’aider le Canton de Morley à s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu de la Loi, et à accroître la transparence de ses réunions :

 
Recommandation 1

Les membres du Conseil du Canton de Morley devraient demeurer vigilant(e)s dans l’exercice de leur obligation individuelle et collective pour s’assurer que la Municipalité remplit ses responsabilités prévues dans la Loi de 2001 sur les municipalités.

 
Recommandation 2

Les membres du Conseil du Canton de Morley devraient veiller à ce que les discussions lors desquelles le quorum est atteint et où il est traité d’une question d’une manière à faire avancer de façon importante les travaux ou la prise de décision du Canton soient reconnues comme des rencontres assujetties aux règles des réunions publiques.

 
Recommandation 3

Le Conseil du Canton de Morley devrait s’assurer de suivre une formation adéquate sur les dispositions de la Loi de 2001 sur les municipalités concernant les réunions publiques et l’application de ces dispositions aux comités.



 

Rapport

33    Le Conseil du Canton de Morley a eu l’occasion d’examiner une version préliminaire du présent rapport et de le commenter. Dans sa réponse, le Canton m’a remercié pour mes recommandations. Je tiens à le remercier à mon tour de sa coopération durant mon enquête.

34    Le présent rapport sera publié sur le site Web de mon Bureau et devrait aussi être rendu public par le Canton. Conformément au paragraphe 239.2(12) de la Loi de 2001 sur les municipalités, le Conseil doit adopter une résolution indiquant comment il entend y donner suite.


__________________________
Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario



[1] L.O. 2001, ch. 25.
[2] Le Comité de la voirie répond à la définition de comité du Conseil au sens du paragraphe 238(1) de la Loi, à savoir une entité dont au moins 50 % des membres sont également membres du Conseil. Les trois membres du Comité de la voirie étaient tous membres du Conseil à ce moment-là.
[3] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une plainte à propos d’une rencontre tenue par les membres du conseil de la Municipalité de Casselman le 27 mai 2021, (août 2022), en ligne.
[4] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une plainte à propos de séances d’information le 7 mars 2018 avec un quorum des conseillers du Village de Casselman, (août 2018), en ligne [Casselman 2018].
[5] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur des plaintes à propos de réunions à huis clos tenues par la Ville de Saugeen Shores les 22 juillet, 11 novembre, 25 novembre 2019 et 24 février 2020, (août 2020), en ligne.
[6] Casselman 2018, supra note 4.
[7] Ombudsman de l'Ontario, Enquête visant à déterminer si le Conseil du Village de Casselman a tenu une réunion à huis clos illégale le 8 janvier 2015, (avril 2015), en ligne.
[8] Lettre de l’Ombudsman de l’Ontario à la Municipalité de St.-Charles (8 février 2022), en ligne.