Enquête sur une réunion à huis clos tenue par la Saugeen Municipal Airport Commission le 27 septembre 2021
Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario
Juin 2022
Plainte
1 Mon Bureau a reçu une plainte concernant une réunion à huis clos tenue par la Saugeen Municipal Airport Commission (la « Commission ») le 27 septembre 2021. La plainte alléguait que la Commission avait indûment discuté de sujets qui ne relevaient d’aucune des exceptions énoncées dans la Loi de 2001 sur les municipalités[1] (la « Loi »).
2 Mon enquête a permis de déterminer qu’il était fondé de discuter d’un Accord d’accès en séance à huis clos. Les discussions concernant les trois autres questions n’étaient pas permises en séance à huis clos et auraient dû être tenues en séance publique.
La Saugeen Municipal Airport Commission
3 Le Saugeen Municipal Airport (l’« Aéroport ») a été constitué en personne morale en 1990 par quatre municipalités du Comté de Grey et du Comté de Bruce dans le but d’exploiter un aéroport régional. L’Aéroport a été constitué par le biais d’un accord municipal, indiquant que l’Aéroport est une commission de services municipaux mixte. Actuellement, l’Aéroport est exploité avec le soutien de la Municipalité de Brockton, la Ville de Hanover et la Municipalité de West Grey.
4 En vertu de son règlement, l’Aéroport est régi par une Commission composée de cinq à sept membres. Chacune des municipalités participantes nomme un(e) membre à la Commission et d’autres membres citoyen(ne)s sont également nommé(e)s en tant que commissaires. Quand mon Bureau a reçu cette plainte à propos de cette réunion, la Commission était composée de sept membres, incluant trois élu(e)s représentant leurs municipalités respectives.
5 La Loi de 2001 sur les municipalités (la « Loi ») définit ainsi un « conseil local » : « Commission de services municipaux, commission de transport, conseil de bibliothèque publique, conseil de santé, commission de services policiers, conseil d'aménagement ou autre conseil, commission, comité, organisme ou office local créés ou exerçant un pouvoir en vertu d'une loi à l'égard des affaires ou des fins d'une ou de plusieurs municipalités. »[2]
6 L'article 202 de la Loi stipule aussi que deux municipalités ou plus peuvent conclure des accords pour créer une commission de services municipaux mixte afin de gérer et fournir des services particuliers, selon l'avis de chaque municipalité participante[3]. Les commissions de services municipaux sont considérées comme des conseils locaux en vertu de l'article 197 de la Loi.
7 La Loi autorise une municipalité à créer et exploiter un aéroport[4]. La Commission est donc un conseil local qui exerce ses pouvoirs en vertu de la Loi à l'égard des affaires des municipalités participantes. Par conséquent, elle est assujettie aux règles des réunions publiques énoncées dans la Loi.
Compétence de l’Ombudsman
8 En vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités, toutes les réunions d'un conseil municipal, d'un conseil local et des comités de l'un ou de l'autre doivent se tenir en public, sauf si elles font l'objet d'exceptions prescrites.
9 Depuis le 1er janvier 2008, la Loi accorde à quiconque le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité ou un conseil local a respecté la Loi en se réunissant à huis clos. La Loi fait de l'Ombudsman l'enquêteur par défaut dans les municipalités et les conseils locaux qui n'ont pas désigné le(la) leur pour examiner les plaintes concernant le respect des règles des réunions publiques.
10 L'Ombudsman enquête sur les réunions à huis clos pour la Saugeen Municipal Airport Commission.
11 Lorsque nous enquêtons sur des plaintes concernant des réunions à huis clos, nous examinons si les exigences relatives aux réunions publiques énoncées dans la Loi et dans le règlement de procédure applicable ont été respectées.
12 Depuis 2008, mon Bureau a enquêté sur des centaines de réunions à huis clos. Pour aider les conseils municipaux, le personnel municipal et le public, nous avons créé un recueil en ligne des cas de réunions publiques. Nous avons créé ce recueil interrogeable pour permettre aux intéressé(e)s d'accéder facilement aux décisions de l'Ombudsman et à ses interprétations des règles des réunions publiques. Les membres du conseil et le personnel peuvent consulter ce recueil pour éclairer leurs discussions et leurs décisions afin de déterminer si certaines questions devraient ou pourraient être discutées à huis clos, ainsi que pour examiner les questions liées aux procédures des réunions publiques. Des résumés des décisions antérieures de l'Ombudsman sont consultables dans ce recueil : https://www.ombudsman.on.ca/digest-fr/accueil.
Processus d’enquête
13 Le 26 novembre 2021, nous avons informé la Commission de notre intention d'enquêter sur cette plainte.
14 Mon Bureau a examiné l’Accord municipal de la Commission, qui est un accord conclu entre la Commission et les municipalités participantes dans le but de créer, d’exploiter, d’entretenir et d’améliorer le Saugeen Municipal Airport. Nous avons également examiné les documents connexes à la réunion du 27 septembre 2021, dont l’ordre du jour et le procès-verbal. Mon Bureau a aussi examiné le règlement de procédure de la Commission, qui a été promulgué le 15 décembre 2021, et ses modifications, qui ont été adoptées le 19 janvier 2022.
15 Mon Bureau a interviewé tous(toutes) les membres de la Commission présent(e)s à la réunion du 27 septembre 2021.
16 Mon Bureau a obtenu une entière coopération dans cette affaire.
Réunion du 27 septembre 2021
17 La Commission a tenu une réunion extraordinaire le 27 septembre 2021. Six des sept membres étaient présent(e)s. La réunion a été déclarée ouverte à 18 h 59 et les participant(e)s se sont retiré(e)s à huis clos à 19 h 01. La Commission a cité les exceptions des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat et des projets et des instructions dans le cadre de négociations pour tenir cette réunion à huis clos.
18 La résolution adoptée pour se retirer à huis clos ne donne pas d’autres renseignements sur les sujets de discussion de la séance à huis clos.
19 Une fois réunie à huis clos, la Commission a discuté des quatre points suivants, qui se trouvent inscrits à l’ordre du jour de la réunion à huis clos :
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Accord d’accès
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Accord municipal
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Clause de retrait de l’Accord municipal
-
Questions relevant des « finances de 2021 ».
L’Accord d’accès
Discussions à huis clos
20 Les discussions de la Commission à ce sujet ont porté sur ses pourparlers en cours avec un(e) client(e) concernant les termes de leur Accord d’accès – contrat entre la Commission et un(e) client(e) permettant l’accès aux installations de l’Aéroport et leur utilisation. La Commission a reçu une mise à jour sur le progrès des négociations avec le(la) client(e) et a discuté du contenu de l’Accord d’accès.
21 La Commission a également autorisé un plan d’action précis visant à assurer que le(la) client(e) signe l’Accord d’accès.
22 Pour discuter de cette question à huis clos, la Commission a cité l’exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations énoncée à l’alinéa 239 (2) k) de la Loi, ainsi que l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat énoncée à l’alinéa 239 (2) f) de la Loi. Au cours de nos entrevues, l’un(e) des commissaires a également cité l’exception des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, énoncée à l’alinéa 239 (2) b) de la Loi.
Analyse
Applicabilité de l’exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations
23 L’exception à l’alinéa 239 (2) k) de la Loi autorise les discussions à huis clos dans le but de protéger des renseignements qui pourraient compromettre la position de négociation de la Commission, ou donner à une autre partie un avantage injuste dans le cadre d'une négociation en cours[5]. Pour que l’exception s’applique, la Commission doit montrer que :
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la discussion à huis clos portait sur des positions, des projets, des procédures, des critères ou des instructions;
-
les positions, projets, procédures, critères ou instructions sont destinés à être appliqués aux négociations;
-
les négociations sont en cours ou à venir;
-
les négociations sont menées par la Commission ou en son nom[6].
24 Durant la séance à huis clos, la Commission a discuté de négociations en cours et elle a autorisé certaines modifications à apporter à l’Accord d’accès afin de faire progresser ces négociations. De plus, la Commission a donné des instructions concernant un plan d’action précis durant les négociations. La première partie du critère est satisfaite.
25 L’autorisation donnée par la Commission quant à un plan d’action concernant l’Accord d’accès s’inscrivait dans le contexte d’échanges soutenus avec le(la) client(e) – soit un processus de négociation. Les instructions ont été données dans l’espoir que le(la) client(e) signe l’Accord. Par conséquent, la deuxième partie du critère est satisfaite.
26 Les négociations étaient menées par la Commission au moment de la réunion. Les troisième et quatrième parties du critère sont également satisfaites.
27 Les discussions concernant l’Accord d’accès se sont dûment tenues à huis clos car elles relèvent de l’exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations. Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’examiner l’applicabilité des deux autres exceptions suggérées par la Commission.
L’Accord municipal
Discussions à huis clos
28 Au cours de la séance à huis clos, la Commission a également discuté de la mise à jour de l’Accord municipal, qui n’avait pas été actualisé depuis une décennie. Cet Accord définit les détails du partage des coûts entre les municipalités participantes et comprend des dispositions sur le retrait de l’Accord, le pouvoir de la Commission, l’obligation de conserver des états financiers vérifiés et l’arbitrage exécutoire.
29 La Commission a examiné l’historique de l’Accord municipal et a suggéré des changements. Nos entrevues ont révélé que la discussion avait porté sur des changements mineurs à l’Accord municipal, comme la mise à jour du document pour indiquer les dates actuelles.
30 Ces discussions ont eu lieu à huis clos en vertu de l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat, énoncée à l’alinéa 239 (2) f) de la Loi. La Commission a également invoqué l’exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations, énoncée à l’alinéa 239 (2) k) de la Loi, pour tenir cette réunion à huis clos.
31 En ce qui concerne l’exception du secret professionnel de l’avocat, aucun(e) avocat(e) n’était présent(e) à la réunion et les personnes que nous avons interviewées nous ont dit qu’aucun conseil juridique n’avait été donné lors de cette réunion, ni avant, au sujet de l’Accord municipal. Lors des entrevues, aucune des personnes auxquelles nous avons parlé ne s’est souvenue d’avoir discuté d’un conseil juridique à ce sujet.
32 En ce qui concerne l’exception des projets et des négociations, nous avons appris que la Commission s’était appuyée sur cette exception car la discussion de l’Accord municipal en public aurait affaibli sa position de négociation avec de possibles acheteur(euse)s tier(ce)s ou avec les trois municipalités participantes. L’Accord municipal est un document accessible au public.
Analyse
Applicabilité de l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat
33 En vertu de l’alinéa 239 (2) f) de la Loi, une réunion peut se dérouler à huis clos, entièrement ou en partie, si le sujet examiné est un conseil protégé par le secret professionnel de l’avocat, y compris les communications nécessaires à cette fin. L’objectif de cette exception est que les élu(e)s de la municipalité puissent parler librement de conseils juridiques sans crainte de divulgation[7].
34 Aucun(e) avocat(e) n’était présent(e) à la réunion, et nous avons été informé(e)s que la Commission n’avait pas reçu de conseils d’un(e) avocat(e) à propos de l’Accord municipal durant ou avant la réunion. Personne ne s’est souvenu d’avoir discuté de conseils juridiques. Par conséquent, les discussions sur l’Accord municipal ne relevaient pas de l’exception des communications protégées par le secret professionnel de l’avocat.
Applicabilité de l’exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations
35 L’alinéa 239 (2) k) de la Loi permet de tenir des discussions à huis clos sur des projets et des instructions dans le cadre de négociations. Comme indiqué précédemment, cette exception s’applique quand la Commission est en mesure de démontrer que la discussion à huis clos portait sur des positions, projets, procédures, critères ou instructions destinés à être appliqués à des négociations menées par la Commission ou en son nom.
36 Aucune preuve ne permet de penser qu’il y ait eu des discussions sur l’élaboration de projets, de procédures, de critères ou d’instructions pour des négociations actuelles ou éventuelles avec un(e) acheteur(euse) éventuel(le) ou avec les municipalités participantes. De plus, l’Accord municipal est un document qui a été rendu public, et les tierces parties auraient été au courant de son contenu avant toute négociation.
37 Par conséquent, l’exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations ne s’applique pas.
La clause de retrait de l’Accord municipal
Discussions à huis clos
38 En plus des discussions générales sur l’Accord municipal, la Commission a discuté d’une clause de retrait spécifique de l’Accord municipal et du processus par lequel une municipalité pouvait se retirer de l’Accord.
39 Au moment de la réunion à huis clos, aucune des trois municipalités participantes n’avait communiqué d’avis de retrait.
40 Aucun(e) avocat(e) n’était présent(e) à la séance à huis clos et aucun conseil juridique préalable n’a été fourni à la Commission sur la clause de retrait ou le processus de retrait. Dans les entrevues, aucune des personnes avec lesquelles nous avons parlé ne s’est souvenue d’avoir discuté d’un conseil juridique à ce sujet.
41 Pour tenir cette discussion à huis clos, la Commission a invoqué l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat, énoncée à l’alinéa 239 (2) f) de la Loi, ainsi que l’exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations, énoncée à l'alinéa 239 (2) k) de la Loi.
Analyse
Applicabilité de l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat
42 À ce sujet, les membres de la Commission ont lu la clause de retrait de l’Accord municipal et ont discuté entre eux(elles) des conséquences d’un retrait. Lors des entrevues, personne n’a dit à mon Bureau que des conseils juridiques avaient été discutés.
43 Comme aucun conseil juridique provenant d’un(e) avocat(e) n’a été présenté ou examiné au cours de cette discussion, l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat ne s’applique pas à la question.
Applicabilité de l’exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations
44 L’exception concernant les projets et les instructions dans le cadre de négociations s’applique quand la Commission est en mesure de démontrer que la discussion à huis clos portait sur des positions, projets, procédures, critères ou instructions destinés à être appliqués à des négociations menées par la Commission ou en son nom.
45 Notre Bureau a conclu que, pour que cette exception s’applique, la discussion doit viser « à élaborer un plan d’action détaillé pour des négociations actuelles ou futures »[8].
46 Notre enquête indique que la Commission ne menait aucune négociation concernant le retrait de l’Accord au moment de cette réunion. En outre, la clause de retrait permet un retrait unilatéral de la part de toute municipalité participante sans aucune négociation avec la Commission. De plus, nous avons constaté qu’il n’y avait pas eu de discussion sur des projets ou des instructions dans le cadre d’une négociation future.
47 Comme indiqué précédemment, l’Accord municipal (qui comprend la clause de retrait) est un document public, si bien qu’un examen de son contenu ne révèle rien de confidentiel.
48 L’exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations ne s’applique pas aux discussions sur la clause de retrait.
Les « finances de 2021 »
Discussions à huis clos
49 Enfin, durant la séance à huis clos, la Commission a examiné sa situation financière, ses revenus et ses dépenses. Plus précisément, les personnes interviewées ont déclaré à mon Bureau que la Commission avait examiné jusqu’à quel point elle était en voie de respecter son budget, ce que serait sa situation financière probablement à la fin de l’année, et quels éléments il faudrait ajouter au budget de 2022.
50 L’un(e) des commissaires nous a expliqué que la Commission cherchait à mieux comprendre sa situation financière afin de planifier le budget de 2022 et de demander une contribution pertinente aux municipalités participantes. Toutefois, mon Bureau a été informé que la Commission ne négociait pas avec les municipalités en vue d’un changement de financement au moment de la réunion, et qu’elle n’avait pas discuté de projets de futures négociations de financement.
51 Mon Bureau a été informé qu’en général, la Commission discute des renseignements financiers en séance publique, mais dans ce cas, la Commission voulait examiner l’augmentation des frais juridiques à laquelle elle serait confrontée en 2021. Ces frais juridiques résultaient principalement de négociations en cours avec un(e) client(e) en particulier, mais la Commission a uniquement discuté de frais juridiques encourus par elle, et non de renseignements privés concernant ce(cette) client(e).
52 Aucun(e) avocat(e) n’était présent(e) à la réunion et aucun conseil juridique concernant la situation financière de 2021 n’a été communiqué lors de la réunion.
53 Pour examiner cette question à huis clos, la Commission a cité l’exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations, à l’alinéa 239 (2) k) de la Loi, ainsi que l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat, à l’alinéa 239 (2) f) de la Loi. L’un(e) des commissaires a également suggéré que l’exception des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, énoncée à l’alinéa 239 (2) b) de la Loi, s’appliquait à la discussion.
Analyse
Applicabilité de l’exception des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée
54 L’alinéa 239 (2) b) de la Loi permet de tenir une réunion à huis clos quand les discussions portent sur des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, y compris les employé(e)s de la municipalité. Les renseignements privés sont des renseignements dont on peut raisonnablement présumer qu’ils permettront d’identifier quelqu’un en particulier[9].
55 Dans ce cas, il n’a pas été question de renseignements privés concernant une personne en particulier durant cette discussion.
56 Les discussions sur les frais juridiques de la Commission ne relèvent pas des renseignements privés concernant des personnes qui peuvent être identifiées. En fait, mon Bureau a déjà conclu que les frais juridiques engagés par des membres du conseil dans le cadre de leurs fonctions officielles ne sont pas considérés comme des « renseignements privés »[10]. De même, bien que ses conclusions ne soient pas contraignantes pour mon Bureau, le Commissaire à l’information et à la protection de la vie privée a déclaré que le montant de frais juridiques payés par une municipalité pour défendre une affaire ne constitue pas des renseignements privés, car les renseignements portent sur les dépenses de la municipalité, et non sur la partie adverse[11].
57 L’exception des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée ne s’applique pas.
Applicabilité de l’exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations
58 Comme expliqué au paragraphe 23, l'exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations s’applique si la Commission est en mesure de montrer que les discussions à huis clos portent sur des positions, projets, procédures, critères ou instructions destinés à être appliqués à des négociations menées par la Commission ou en son nom.
59 Lors de nos entrevues, trois raisons distinctes ont été données pour appliquer cette exception :
-
négociations avec un(e) client(e) en particulier;
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négociations avec les municipalités participantes;
-
négociations avec des acheteur(euse)s éventuel(le)s.
60 En ce qui concerne les négociations avec un(e) client(e), il a été dit à mon Bureau que les frais juridiques devaient être discutés à huis clos pour protéger la position de négociation de la Commission avec le(la) client(e). Cependant, une discussion sur une somme d’argent dépensée ne constitue pas une position, un projet, une procédure, un critère ou une instruction. Bien que ses conclusions ne soient pas contraignantes pour mon Bureau, le Commissaire à l’information et à la protection de la vie privée a conclu de même qu’une déclaration sur une somme dépensée en frais juridiques par une municipalité ne porte pas sur des positions, projets, procédures, critères ou instructions[12].
61 En ce qui concerne les négociations avec les municipalités participantes, l’un(e) des membres de la Commission a laissé entendre que les discussions sur la situation financière de la Commission auraient affaibli la position de la Commission dans le cadre de négociations d’un changement de financement avec les municipalités. Cette affirmation est en contradiction avec celles d’autres membres de la Commission que nous avons interviewé(e)s, qui ont catégoriquement nié que toute négociation possible de financement ait été discutée au regard des renseignements financiers de 2021. Selon la prépondérance des probabilités, je ne suis pas convaincu que la Commission ait tenu des discussions à huis clos sur des positions, projets, procédures, critères ou instructions destinés à être appliqués à des négociations avec ses partenaires municipaux.
62 En ce qui concerne les négociations avec des acheteur(euse)s éventuel(le)s, mon Bureau a confirmé que la Commission ne négociait pas avec un(e) acheteur(euse) à l’époque de la réunion. De plus, la Commission n’a pas discuté de plans de futures négociations avec un(e) acheteur(euse) éventuel(le).
63 L’exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations ne s’applique pas.
Applicabilité de l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat
64 L’alinéa 239 (2) f) de la Loi permet de tenir une réunion à huis clos quand la discussion porte sur des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat, y compris les communications nécessaires à cette fin. Mon Bureau a déterminé précédemment que le secret professionnel de l’avocat(e) ne s’applique pas aux discussions générales sur les sommes dépensées en frais juridiques, car elles ne révèlent pas à elles seules des renseignements protégés[13].
65 Durant les entrevues menées par mon Bureau, l’un des membres de la Commission nous a dit que des conseils juridiques avaient été discutés à ce sujet. Cependant, il n’a pas été en mesure de donner des détails sur le sujet de ces conseils, et les autres membres de la Commission ne se sont pas souvenu(e)s d’avoir discuté de conseils juridiques. Le procès-verbal ne fait aucune référence à des discussions sur des conseils juridiques.
66 Selon la prépondérance des probabilités, je suis convaincu que la Commission n’a discuté d’aucun conseil juridique sur ses renseignements financiers de 2021, lors de cette réunion. Par conséquent, les discussions sur la situation financière de 2021 ne relèvent pas de l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat.
Entrecouper la discussion
67 En réponse à une version préliminaire de ce rapport, la Commission a déclaré à mon Bureau qu’elle estimait que l’Accord d’accès était « étroitement lié » et « inséparable » des autres sujets, et qu’étant donné que l’Accord d’accès pouvait être discuté à huis clos, les autres sujets pouvaient également être examinés à huis clos.
68 Mon Bureau a précédemment conclu que les questions qui ne relèvent habituellement pas d’une des exceptions de la Loi peuvent parfois être discutées à huis clos si elles portent sur un sujet unique, et si le fait d’entrecouper les renseignements causerait une interruption déraisonnable de la conversation[14]. Cependant, quand la discussion peut être séparée, les membres sont censé(e)s revenir en séance publique pour les aspects de la discussion qui ne relèvent pas d’une exception aux réunions publiques[15].
69 D’après les preuves dont dispose mon Bureau, je suis convaincu que la discussion de la Commission sur les négociations concernant l’Accord d’accès était séparée et distincte des discussions sur l’Accord municipal, sa clause de retrait et la situation financière de 2021. Notre enquête indique que, lors de la réunion à huis clos, la Commission a fait la distinction entre ces sujets, ne passant à un nouveau sujet qu’après avoir terminé sa discussion sur le sujet précédent. Par conséquent, il aurait été possible pour la Commission d’entrecouper sa discussion entre la séance publique et la séance à huis clos, sans causer d’interruption déraisonnable de la conversation.
Résolution adoptée pour se retirer à huis clos
70 Le paragraphe 239 (4) de la Loi stipule qu’avant de tenir une réunion à huis clos, une municipalité ou un conseil local, ou un comité de l’un ou de l’autre, doit indiquer par voie de résolution « le fait que la réunion doit se tenir à huis clos et la nature générale de la question devant y être étudiée ».
71 Dans l’affaire Farber v Kingston (City), la Cour d’appel de l’Ontario a expliqué que « la résolution de se retirer à huis clos devrait comporter une description générale de la question à discuter, de sorte à maximiser les renseignements communiqués au public sans compromettre la raison d’exclure le public »[16].
72 La résolution adoptée par la Commission pour se retirer à huis clos a cité les exceptions des réunions à huis clos sur lesquelles elle s’est appuyée pour exclure le public. Cependant, la résolution a omis de donner plus de détails sur la discussion que la Commission avait l’intention de tenir, comme l’exige le paragraphe 239 (4) de la Loi. L’ordre du jour de la réunion publique qui avait été communiqué au public ne comprenait pas non plus d'autres informations sur les discussions à huis clos.
73 Le compte rendu fait après la réunion à huis clos a révélé les points inscrits à l’ordre du jour de la réunion à huis clos et a donné un aperçu général des discussions à huis clos. Je comprends bien les préoccupations de la Commission en matière de confidentialité, mais le fait que la Commission a fait rapport en séance publique et a donné des renseignements généraux sur les sujets discutés semble indiquer que des renseignements similaires auraient pu être inclus à la résolution adoptée pour se retirer à huis clos.
74 Notre examen indique que la Commission aurait pu révéler beaucoup plus de renseignements sur les sujets de conversation prévus, sans compromettre la raison d’exclure le public de la discussion.
75 De plus, la résolution ne précise pas quelle exception des réunions à huis clos a été invoquée pour chacune des questions examinées à huis clos. Notre enquête a révélé que les membres de la Commission comprenaient différemment quelles exceptions s’appliquaient à chaque question particulière examinée à huis clos.
76 Bien que la Loi n’exige pas que les résolutions précisent quelle exception est invoquée pour chaque question à examiner à huis clos, je considère qu’il s’agit d’une pratique exemplaire et j’encourage la Commission à adopter cette pratique pour renforcer la responsabilisation et la transparence de ses réunions.
Opinion
77 La Saugeen Municipal Airport Commission n’a pas enfreint la Loi de 2001 sur les municipalités en se retirant à huis clos le 27 septembre 2021 pour discuter de l’Accord d’accès. Les discussions sur cette question étaient permises en vertu de l’exception des projets et des instructions dans le cadre de négociations, énoncée à l’alinéa 239 (2) k) de la Loi.
78 La Saugeen Municipal Airport Commission a enfreint la Loi de 2001 sur les municipalités le 27 septembre 2021 en discutant à huis clos de l’Accord municipal, de la clause de retrait de l’Accord municipal et de la situation financière de 2021.
79 La résolution adoptée par la Saugeen Municipal Airport Commission pour se retirer à huis clos le 27 septembre 2021 n’a pas donné de renseignements significatifs au public sur les questions qui seraient discutées à huis clos. En omettant d’énoncer par voie de résolution la nature générale des questions à examiner à huis clos, la Saugeen Municipal Airport Commission a enfreint les exigences de l’alinéa 239 (4) a) de la Loi de 2001 sur les municipalités.
Recommandations
80 Je fais les recommandations suivantes pour aider la Saugeen Municipal Airport Commission à s’acquitter de ses obligations en vertu de la Loi et à renforcer la transparence de ses réunions à l’avenir :
Recommandation 1
Les membres de la Saugeen Municipal Airport Commission devraient s’acquitter avec vigilance de leur obligation individuelle et collective pour veiller au respect de leurs responsabilités en vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités.
Recommandation 2
La Saugeen Municipal Airport Commission devrait veiller à ne discuter d’aucun sujet à huis clos à moins qu’il ne relève clairement de l’une des exceptions légales aux exigences des réunions publiques.
Recommandation 3
Quand elle se retire à huis clos, la Saugeen Municipal Airport Commission devrait veiller à ce que les résolutions adoptées pour se retirer à huis clos donnent une description générale des questions à discuter d’une manière qui maximise les renseignements communiqués au public sans compromettre la raison d’exclure le public.
Recommandation 4
À titre de pratique exemplaire, la Saugeen Municipal Airport Commission devrait préciser clairement quelle exception des réunions à huis clos elle compte invoquer pour chacune des questions à examiner à huis clos.
Rapport
81 La Saugeen Municipal Airport Commission a eu l’occasion d’examiner et de commenter une version préliminaire de ce rapport pour mon Bureau. En raison des restrictions mises en place pour cause de COVID-19, certaines modifications ont été apportées à notre processus habituel d’examen préliminaire et nous remercions la Commission de sa coopération et de sa souplesse. Tous les commentaires que nous avons reçus ont été pris en compte dans la préparation de ce rapport final.
82 Dans sa réponse, la Commission a déclaré que ses discussions sur un Accord d’accès, des frais juridiques et sa situation financière de 2021 étaient toutes liées à ses négociations en cours avec une personne en particulier. La Commission a ajouté qu’elle avait discuté de conseils juridiques durant cette réunion.
83 J’ai examiné attentivement la réponse de la Commission mais je ne suis pas convaincu que, selon la prépondérance des probabilités, les discussions sur ces autres questions concernaient des conseils juridiques ou des négociations en cours, et ceci pour les raisons expliquées plus haut dans ce rapport.
84 Ce rapport sera publié sur le site Web de mon Bureau, et il devrait aussi être communiqué au public par la Saugeen Municipal Airport Commission. Conformément au paragraphe 239.2 (12) de la Loi de 2001 sur les municipalités, la Commission est tenue d’adopter une résolution indiquant comment elle entend donner suite à ce rapport.
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Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario
[1] Loi de 2001 sur les municipalités, LO 2001, chap. 25.
[2] Ibid, par. 1 (1).
[3] Ibid, art. 202.
[4] Ibid, art. 70.
[5] Lettre de l’Ombudsman à la Cité de Pickering (23 septembre 2020), en ligne.
[6] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une plainte à propos d’une réunion à huis clos tenue par la Ville de St. Catharines le 25 juin 2018, (février 2019), aux par. 30-31 [St. Catharines], en ligne.
[7] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une plainte à propos de séances à huis clos tenues par la Ville de Hamilton le 16 janvier 2019, (juin 2019), au par. 33, en ligne.
[8] St. Catharines, supra note 6 au par. 34.
[9] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletOntario (AG) v Pascoe, 2002 CanLII 30891 (ONCA) au par. 1, en ligne.
[10] Lettre de l’Ombudsman à la Ville de Midland (4 février 2014), en ligne.
[11] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletOrder MO-2083-F, Toronto (City) (Re), 2006 CanLII 50736 (ON IPC), en ligne.
[12] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletOrder MO-2481, Waterloo (City) (Re), 2009 CanLII 69094 (ON IPC), en ligne.
[13] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur des réunions tenues par la Ville de Collingwood les 6 février et 11 juin 2018, (janvier 2022), au par. 43, en ligne.
[14] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur la réunion à huis clos tenue par le conseil de la Municipalité de St.-Charles le 3 avril 2019, (octobre 2019), au par. 28, en ligne.
[15] Ombudsman de l'Ontario, Enquête à propos d’une plainte sur une réunion à huis clos tenue par la Ville de Plympton-Wyoming le 24 juin 2020, (février 2021), en ligne.
[16] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletFarber v Kingston (City), 2007 ONCA 173 au par. 21, en ligne.